Ce midi, alors que j’étais à demander quelques conseils de maturation d’une mangue et d’une grenade à la caissière de mon magasin bio, la cliente qui me suivait s’invite dans notre conversation. Puis à son tour, elle demande une explication sur le nom d’une huile essentielle (HE) qu’elle avait choisi. Je n’ai pu m’empêcher de lui partager quelques informations basiques sur l’utilisation des HE, sur le choix des marques à privilégier et pourquoi… Cette femme utilise de l’HE de citron (en fait c’est le zeste du citron qui est pressé à froid) dans ses lessives pour désinfecter son linge ! Sauf que les HE sont hydrophobes et que, comme dans une vinaigrette, même en mélangeant l’eau à l’huile jusqu’à obtenir une émulsion, au final chacun se séparera durant le cycle de lavage. Bénéfice = 0 !
Je parle déjà des HE sur ce site car je les utilise beaucoup en aromathérapie énergétique et depuis peu en lecture d’âme. Je me rends compte en me relisant que je n’ai pas assez insisté sur les bons us de ces cadeaux de la nature, ce qui m’a inspiré cet article.
Les plantes ont été de tous temps utilisées en usages traditionnels pour leurs bienfaits aussi bien sur le corps que sur l’âme (rebouteux, sorcières, herboristeries, prêtres…) ou lors de rituels pour se relier aux éléments, aux divinités, au ciel, à la terre (chamans, druides…). Ce lien avec la nature a été interdit, condamné, diabolisé alors même que certaines industries ont plagié la composition moléculaire de ces mêmes plantes pour en faire des remèdes chimiques ! (Je n’insisterai pas trop sur l’HE d’Armoise annuelle (Artemisia Annua), utilisée couramment en Afrique contre le Paludisme et interdite de vente en France depuis le début du Covid !!!).
Depuis une bonne vingtaine d’années, les huiles essentielles connaissent un engouement sans précédent, certainement accentué par l’internet et sa vulgarisation. Pourtant, si les HE sont extrêmement efficaces sur certaines affections, elles ne sont pas sans risques : naturelles ne signifie pas inoffensives (cf le lien vers ma page 😉). La France est en bonne place dans le classement des pays européens producteurs avec une balance commerciale excédentaire de 119 Mio €. En 10 ans, les ventes ont explosé de +47%.
Est-ce une bonne chose ?
Par sur, car leur production est majoritairement destinée (82 % en 2021) à des mélanges pour diverses industries : alimentaires, pharmaceutiques, cosmétiques, parfumeries… Vous n’avez pas pu ignorer que l’ajout d’HE est devenu un argument commercial et publicitaire !
Et c’est là que le bât blesse : l’utilisation intempestive et abusive de ces HE, qu’elles soient sauvages ou cultivées, n’est ni écologique, ni sans conséquences sur leur survie ou sur notre santé.
Produire une telle quantité d’HE a des effets certains sur l’empreinte carbone : des plantes gourmandes en matières premières (terre cultivée, eau, engrais…), en monocultures, d’autres avec un rendement d’extraction relativement faible. On dit souvent qu’il faut 50 pétales de roses pour 1 seule goutte d’HE 🌹 ! Certaines plantes sauvages sont ainsi amenées à disparaître du fait de leur surconsommation, comme l’HE de Santal (Santalum Album à ne pas confondre avec le bois de Santal, Santalum spicatum), de bois de rose (Aniba rosaeodora), d’encens (Boswellia spp)… Pour les plantes cultivées, elles voient leur génome et leur nature sauvage se réduire et seront potentiellement incapables de pousser sans soutien chimique. 🤔
Pour rentabiliser ce « produit », plusieurs solutions sont utilisées par les industriels : ils peuvent ne pas distiller des plantes fraîchement coupées et ramassées car stockées dans d’énormes frigo en attendant que la quantité de stock soit suffisante pour « rentabiliser » la distillation. Ils peuvent également jouer sur la durée de la distillation : il faut savoir que les molécules les plus légères sont les plus odorantes; ce sont elles qui sortent en premier de la distillation et que cette dernière peut durer plus de 24 h selon la plante afin d’obtenir les dernières molécules, les plus lourdes. Certains fabricants peu scrupuleux vont stopper ce processus de distillation avant sa fin afin de faire des économies (de chauffage, de main d’œuvre, de temps…). C’est alors que la plante distillée n’aura plus toutes ses propriétés : parfois plusieurs centaines de molécules différentes composent une HE et c’est cet ensemble complet (Totum) qui résulte d’une distillation douce, complète et non fractionnée qui en fait sa bonne qualité ou non. Il y a des effets dangereux à utiliser une HE de mauvaise qualité : maux de têtes, réactions allergiques, vomissements… Je ne peux que vous conseiller de choisir les marques qui vous partagent les chromatographies de leurs productions de façon claire et précise 😉.
L’autre question que je me pose à propos de l’utilisation comme argument commercial de certaines HE dans les produits ménagers, odorants, cosmétiques… est liée à la nature hydrophobe des HE : elles ne sont naturellement pas solubles dans l’eau. On doit donc utiliser un dispersant pour que les produits industriels ou cosmétiques (majoritairement constitués d’eau si on lit les étiquettes !!!) puissent les intégrer. Or quel est l’impact de ces rejets sur l’environnement ? On sait bien que les eaux usées ne peuvent être complètement et correctement traitées. De plus, certaines HE sont utilisées pour leurs propriétés efficaces envers des micro organismes resistants comme les virus, les bactéries. Or dans le traitement des eaux usées, ce sont des micro-organismes qui dégradent les contaminants organiques. Il serait utopique de penser que tous les résidus d’HE sont traités avec succès. La fraction d’huile essentielle qui parvient au milieu naturel peut-elle entrainer des effets toxiques pour les organismes qui y vivent ? Pour les sols ? Et par effet ricochet, pour les humains ?
Bref, vous l’avez compris, les HE sont à utiliser avec précaution, parcimonie et de façon documentée, raisonnée et intelligente afin de leur rendre hommage, de les préserver. Je ne peux que vous conseiller de bannir de votre chariot de courses tous les produits avec ajout inutile d’huiles essentielles. Et si vraiment vous avez envie que votre linge sente bon et soit bien désinfecté, ajoutez 2 cuillères à soupe de bicarbonate de soude dans le tambour de votre machine avec quelques goutes d’un citron jaune (bio) fraichement pressé plutôt que de l’huile essentielle de Citrus Limonum (attention : à ne pas mélanger à du vinaigre blanc ou l’action du bicarbonate s’annulerait), et pour le linge blanc, le percabonate de soude fera plus que bien l’affaire, en plus de vous aider à garder la blancheur de vos vêtements !
J’ose espérer que cet article vous incitera à adopter de nouveaux gestes conscients d’achat de vos produits ménagers et cosmétiques, et que les HE continueront à nous offrir leurs vertus en cadeaux encore longtemps, car il semblerait qu’un projet de loi européen en vienne à les interdire ☹️ !