Road-Trip 2023

Le quatrième commandement

Comme le disait une belle shakti la semaine dernière : « Tout est juste ! ». et ce n’est pas la lecture du livre d’Alice Miller « Notre corps ne ment jamais » qui me fera dire le contraire.

Je vous conseille plus que fortement ce livre, que vous soyez parents ou non car nous portons tous en nous un enfant intérieur qui a vécu des traumatismes. Trauma? Moi ?

Non !!! Non ???

Et pourtant, nos désirs de vivre notre vie de façon plus sereine, plus épanouie, de faire du développement personnel, … ne trouvent-ils pas leur origine dans notre petite enfance ?

S’il est communément admis que tout se joue dans l’enfance, alors allons (re)visiter cette période charnière qui selon ce que nos parents nous auront offert comme Amour, affection, tendresse, écoute, respect, sollicitude, protection, va conditionner les adultes que nous sommes et dont le corps portera en stigmates les émotions refoulées.

L’auteur part du constat que la majeure partie des troubles de ses patients vient de l’injonction sociétale, religieuse et ancestrale du Quatrième Commandement : « Tu honoreras ton père et ta mère. »

Si j’ai fait le choix d’écrire ce post aujourd’hui c’est qu’à la lecture de ce livre tout ce que j’ai vécu a résonné violemment en moi :

J’ai longtemps pensé que j’avais eu une adolescence « normale », à passer mon temps seule dans ma chambre, à lire, écouter de la musique, tout cela pour fuir ma mère et ma sœur, mon père étant absent toute la semaine et était centré le We sur son bien être, en mode patriarche. J’avais le sentiment d’être le « vilain petit canard », une étrangère dans cette famille.

Je m’inventais des histoires pour me justifier de ce non-amour que je ressentais dans tous les pores de ma peau, de cette différence de traitement entre ma jeune sœur et moi, de ce ressenti de gêner, d’être de trop qui flottait dans l’air quand j’essayais de participer à la vie familiale. Seule ma grand-mère m’apportait un peu de réconfort et de bienveillance quand elle nous rendait visite ; elle seule m’aimait de cet amour vrai et pur que je cherchais désespérément au quotidien.

J’ai appris, il y a peu, que ma mère m’avait confiée aux bons soins de cette grand-mère la première année de ma vie, qu’elle partait travailler la semaine et ne rentrait que le WE. Est-ce cela qui a empêché le lien de se créer entre nous ?

Qu’est ce que j’ai réveillé en elle de blessures pour qu’elle m’abandonne ainsi et qu’ensuite elle se défoule physiquement sur moi ? Cette partie de mon enfance m’est revenue en ressentis physiques il y a quelques mois, lors d’un stage de Tantra. Mon cerveau avait occulté ma petite enfance, et pour cause ! Mon corps non car j’étais sujette aux angines, aux problèmes respiratoires et mes genoux ont vite déclaré forfait.

Toujours est-il que je n’ai jamais pu exprimer ma souffrance et ma haine envers ma mère car elle est tombée malade, pendant longtemps avant de mourir le lendemain de mes 16 ans ! J’ai été soulagée, une peur diffuse m’avait quittée mais me suis en même temps sentie coupable et honteuse d’avoir de telles pensées.

Comment oser reconnaitre ce qui était en moi alors qu’elle n’était plus ? Le manque affectif a commencé à se manifester comme un trou béant au niveau de mon ventre et mes premières crises de boulimie ont commencées. Crises qui se sont aggravées lorsque à peine deux ans plus tard, mon père m’a mise à la porte pour refaire sa vie « parce que je le gênais . » Avec en bonus, une sœur non majeure à m’occuper.

Je dis souvent que je n’ai pas fini d’être éduquée, que je me suis faite toute seule, que je n’ai pas eu le choix. Enfin si, un avocat m’a expliqué il y a moins d’un an, que j’aurais pu aller au tribunal parce que légalement mon père ne pouvait faire cela. Mais avant cela, personne ne m’en avait parlé. Aucun adulte de mon entourage n’a osé porter de jugement sur ce double abandon, aucune assistante sociale ne m’a conseillée.

Alors j’ai continué à essayer de remplir le vide affectif parental par de la nourriture, par des sorties en boîte de nuit où je buvais plus que de raison (je vous parle d’un temps que les moins de 50 ans ne peuvent pas connaitre 😉 ). Et je me suis blindée. J’ai essayé d’être forte, de vivre chaque jour l’un après l’autre, de survivre dans un monde d’adultes dont je n’avais pas les codes et dans lequel je ne maitrisais aucun mode d’emploi. Je me suis habillée d’une carapace de piquants et d’agressivité qui me faisait repousser toute personne bienveillante s’approchant de trop près.

J’ai essayé d’aimer des hommes qui me semblaient pouvoir combler ce besoin du cœur jusqu’à en choisir un avec lequel j’ai inconsciemment cru pouvoir « réparer » ce qui ne peut être réparé. J’ai baissé ma garde et il m’a détruite, humiliée, trompée, anéantie, écrasée. Alors j’ai rassemblé ce qu’il me restait de courage et suis partie pour m’éloigner de cette violence.

C’est ensuite, lors d’une thérapie que j’ai compris que rien de ce que j’avais vécu n’était « normal », que j’avais été maltraitée par mes deux parents et que mon corps m’envoyait des messages depuis des années mais que je l’avais pas écouté. J’ai pu calmer mes crises mais mon rapport à la nourriture est restée soucieux, en mode « je t’aime moi non plus ».

J’ai décidé un jour de couper les ponts avec ce qu’il me restait de cette famille, mon père et ma sœur car les voir me faisaient à chaque fois plus de mal que de bien. Je suis devenue « évitante » face à l’engagement, ne me suis jamais mariée parce que pour moi, il était inconcevable que mon père m’accompagne à l’autel. Cela aurait été une hypocrisie totale !

Je n’ai pris conscience que récemment, toujours grâce au tantra, de mon « évitement » à m’engager dans des relations sentimentales, en choisissant, ou me laissant choisir, par des hommes avec lesquels je savais instinctivement que cela ne fonctionnerait pas. Je crois, en toute honnêteté que j’ai toujours fait ainsi dans ma vie affective mais cela s’est accentué après cette histoire. Je me suis complètement coupée de mes ressentis et ai mis du mental ou du sexe là où cela aurait du commencer par le cœur.

Tout ça pour revenir au livre d’Alice Miller car la semaine dernière, lors d’une structure de tantra, j’ai ressenti en moi de la colère envers mes parents, de la rage pour ce que j’ai vécu enfant, ado et jeune adulte et derrière tout cela, de l’injustice.  » La haine ne rend pas malade, C’est vrai de la haine refoulée, déconnectée, mais non du sentiment vécu, consciemment et exprimé. »

Alors aujourd’hui j’ose écrire cette rage, cette haine pour ceux qui m’ont fait croire que l’amour se méritait, et que JE ne le méritais pas. J’ai payé cher le prix de cette croyance, je le paye encore physiquement mais aujourd’hui j’ose dire STOP !

J’ai appris à m’aimer et à m’apporter ce dont ma petite fille intérieure a besoin, il ne me reste plus qu’à le pratiquer au jour le jour. Mais je suis confiante car je suis une battante et que je n’aspire qu’à laisser la Joie et l’Amour guider ma vie.

Namasté à ceux et celles qui m’ont accompagnés sur ce long chemin, même si nos routes se sont séparées depuis, je sais aujourd’hui ce que je vous dois et vous en suis reconnaissante du fond du cœur. Et merci également aux hommes qui ont croisés ma route et m’ont permis cette prise de conscience.

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